Juste à l'Est du Parking

[ Votre réveil ]

Il faut avancer. Alors Makura avance. Il fallait sortir du Parking, alors Makura est sorti du Parking. Et là voilà maintenant, devant la sortie, entouré de personnes qui courent, qui fuient. Il faut courir ? Alors Makura se met à courir, mais elle ne sait ni où elle se trouve, ni où elle doit aller.
Alors, la seule chose qui lui reste à faire, c'est rester à l'endroit où elle se trouve. Makura n'est pas idiote, elle ne va pas rester fixer là, devant la sortie, à attendre que ses camardes viennent la trouver. Elle décide donc de longer les murs du parking, tout simplement. Elle entend des bruits, des craquements de branches, des respirations. Mais Makura ne peut paniquer, elle n'a pas encore compris la situation...

En contournant le parking, les bruits s'éloignent. Des gens font-ils comme elle ? Peut-être, mais s'ils le font, c'est avec discrétion.

La jeune fille pourrait allumer sa lampe de poche, pour voir si des personnes se trouvent près d'elle, mais elle préfère pour le moment rester "cacher", quand elle serait posée, elle verrait, oui, elle verrait.
Et puis elle arrive, pour le moment, à voir. Non pas très bien, mais elle arrive à comprendre que la grande teinte gris clair à sa gauche est le parking, et que les petites teintes de gris près d'elles sont des touffes de plantes, et qu'au loin, les immenses formes grises, plus foncées, des arbres.

Makura continue à longer les murs. Elle ne pense à rien. En fait, elle cherche un endroit dans lequel elle pourrait se poser un instant, à l'abris des autres.
Quelques minutes passent, le parking est toujours à ses côtés, ou bien il est immense, ou bien Makura marche lentement. Tant pis.

Au bout d'un certain temps, Makura arrive à percevoir une grande forme grise. Elle se stoppe, et reste immobile, à la fixer. Elle rajuste ses lunettes sur son nez, geste inutile, elle ne pourra pas savoir ce que c'est comme cela. Alors Makura s'agenouille, et à quatre pattes, s'avance de la forme. Les cailloux lui font un peu mal à la blessure qu'elle s'était faite la veille, mais elle continue à avancer. Elle n'est pas en état mental de ressentir la douleur. Elle traine ses sacs, ce qui fait du bruit, mais tant pis. Elle arrive enfin devant la forme. Celle ci fait au moins deux fois sa taille ( rappellons que Makura est à quatre pattes ). La jeune fille tend doucement sa main, non-tremblante. Elle touche quelque chose... une feuille ? Makura hoche la tête, elle attrape ses sacs, et les places au milieu de ce qui est, apparement un bosquet. Elle fait du bruit, car les branches évidemment craque, mais tant pis.
Lors qu'elle a fini de placer ses sacs, c'est à son tour de se placer dans le bosquet. Elle préfère pénétrer un peu celui-ci, ne pas prendre le risque de se faire voir... Les branches, certes petites, lui fouettent tout de même son tee shirt, son pantalon, son visage. Mais tant pis. Tant pis oui.

Après être rentrée légèrement dans le bosquet, Makura s'accroupit. Elle doit baisser la tête car une branche lui égratine le visage. Sa grande taille ne sera pas un atout dans cette aventure. Mais l'adolescente n'est pas encore en état de penser à cela. Machinalement, elle attrape le sac fourni généreusement par l'armée, fouille aveuglement, et en sort automatiquement la lampe de poche, la carte, et la boussole. En tripotant l'intérieur de son sac, elle touche quelques pains, une bouteille d'eau et... quelque chose qu'elle n'arrive pas à discerner.
L'adolescente prend une grande inspiration, et, cette fois-ci, se décide à allumer sa lampe de poche, pour pouvoir mieux voir l'intérieur de son sac. D'une main elle tient la lampe, de l'autre le sac, et en cas de vent, elle retient la carte et la boussole à l'aide de sa jambe droite.

Si un de ses camarades se décide, tout comme elle, d'aller derrière le parking, et passe du côté droit du parking, il pourra apercevoir de la lumière provenant d'un bosquet. Makura n'est pas en bonne position, mais elle en a conscience.

Keiko avait entendu avec effroi et incompréhension le principe du DVD et donc leur but final ici, et pour la première fois de sa vie après la mort de ses parents et de son frère, elle fut complètement déstabilisée...
Elle était sortie de l'école presque la dernière parce que ses jambes n'avaient pas voulu la lever, elles tremblaient... pourtant elle n'était pas de ces filles complètement douces à la Riana ou Izumi (quoiqu'elle pouvait sûrement péter un câble) mais le gouvernement l'avait vraiment prit par surprise... Ce qui l'avait chagriné un peu, c'était que Saitou et Misako étaient parties sans même la regarder, sans l'attendre, et là ben y'avait eu personne dehors, pas un chat, même pas un ennemi, et c'était pas plus mal parce que Keiko ne se sentait pas vraiment d'attaque là tout de suite.

Elle était toujours collée au mur, la sueur coulait le long de ses joues et elle ne savait plus quoi faire. Se rappelant la garce qu'elle était avec ses parents et ses grands-parents, elle tapa du pied en marmonnant :

"Tu as pas le droit de te laisser aller Keiko ! tu as déjà était bien plus fort espèce de grande gueule !"

Du coup, un peu revigorée, elle resserra son étreinte sur la lanière de son sac et recula doucement vers l'arrière du bâtiment, fixant devant elle pour voir si personne n'arrivait pour la liquider, mais elle n'avait pas pensé à regarder derrière... Ni dans son sac d'ailleurs, elle n'avait aucune idée de son arme mais c'était pas son principal souci tout de suite, il était 6h30, il commençait presque à faire jour et elle frissonnait, sentant la chair de poule sur ses bras, et ses chaussures lui faisaient mal aux pieds... Elle continuait doucement à reculer hyper concentrée quand les hauts-parleurs se mirent à grésiller puis la voix de Kenji retentit...
Tellement concentrée, elle fut prise d'un coup de panique en entendant une voix et se prit les pieds dans un bosquet avant de chuter en arrière les yeux terrorisés de ne pas savoir de quelle hauteur elle allait tomber...

La chute ne fut pas longue, elle se rattrapa sur quelque chose ou quelqu'un et ne se fit presque aucun mal à part les dizaines de coupures faîtes pas les branches pour la remercier de les avoir écrabouillées sans doute.
Elle était en train de se dépêtrer des branchages et de s'essuyer la terre sur le visage quand elle remarqua la lampe de poche pointée sur ses pieds... merde elle venait de déranger quelqu'un... soit il était mort, soit psychopathe soit paralysé de peur... elle n'osa plus bouger...

"Euh.... qui est là ?" demanda-t-elle, stressée... parce qu'avec la lampe de poche dans cette position, elle était incapable de déceler l'identité de la personne en face d'elle...

Toujours cachée dans son bosquet, Makura découvrait son arme, elle la déplia, la replia, et la reposa dans le sac : ça ne l'aiderait pas à grand chose. La nippone éteignit sa lampe de poche, la posa dans sac et attendit en se recroquevillant sur elle-même. Elle pouvait entendre, au loin, du mouvement, sûrement les gens de sa classe qui allaient eux aussi ceux réfugiés, ensemble, en groupe, encore et toujours. Makura soupira, seule, toujours, encore, à jamais. Tous les autres devaient être entrain de se soutenir, de se réconforter, de se prouver qu'ils s'aiment, de se protéger et elle... elle était seule. Sans Hiromi, qui avait sûrement préférée rester avec Megumi. Pessimiste la Makura, n'est-ce pas ? Mais comment ne pas l'être alors que depuis son enfance, on lui disait que personne ne pourrait aimer un boulet comme elle, comment ne pas se sentir inutile, mal aimée, après toutes ces années ? Certes, sa mère l'aimait, mais c'était sa mère, c'était normal... Ando ? Hiromi ? Ils avaient du avoir pitié d'elle, simplement, aucun d'eux n'étaient là, à ses côtés, après tout. Abandonnée, c'est ce qu'elle était, abandonée dans Battle Royale.
Le cerveau de Makura se mit tout d'un coup à tilter. Le jeu, les règles. Et alors elle comprit que :
*Je ne serais plus là dans 3 jours, je vais mourir.*
Un instant, Makura fut en état de choc, incapable de bouger, de penser, puis elle haussa les épaules, calmement. Mourir, pourquoi pas. Elle était inutile et malheureuse, pourquoi devrait-elle être la gagnante de ce stupide jeu ? Ana, Miyu, Ando mériteraient de gagner ce jeu, ils étaient des bons vivants et rendaient les gens heureux. Shun était quelqu'un d'intelligent, qui deviendrait médecin et qui sauverait des vies, il méritait de gagner ce jeu. Elle, elle ne le méritait pas, elle ne servait à rien, alors elle acceptait sa mort, oui.
Makura se détendit, elle regarda le Ciel et murmura un « Je suis désolée, maman »

A ce moment-même, elle entendit un bruit, oui... Qui venait de devant elle, il y avait quelqu'un qui s'approchait... Makura attrapa sa lampe et la serra fort, l'allumer ou pas l'allumer ? La nippone hésitait fortement, elle tremblait comme une feuille. Cependant, pile quand elle l'alluma, et que Kenji se mit à parler, quelqu'un tomba sur son corps en boule ( elle est recroquevillée ). « Aille ! » ne put s'empêcher de pester Makura. La personne tomba à ses côtés et se releva, Makura la voyait se frotter un peu partout, c'était Keiko.
Keiko ne lui avait jamais adressé la parole ni même un regard, c'était simple, clair et net comme "relation" entre les deux jeunes filles. Mais là, Makura n'arrivait pas à faire des reproches, elle allait mourir, à quoi bon se plaindre ?
"Euh.... qui est là ?"

Keiko ne semblait pas très rassurée, Makura sourit alors, elle rabaissa la lampe de torche de manière à ce que sa camarade ne soit pas aveuglée par la lumière et puisse la voir.

« C'est... C'est moi... Makura... » répondit-elle de son habituelle faible et petite voix, assez enfantine, d'ailleurs.

Keiko avait le coeur qui battait plus vite que les 4 sabots d'un cheval au galop, si fort d'ailleurs que ça lui comprimait la poitrine et la rendait ainsi complètement à l'ouest en cas d'attaque, si bien que si la personne en face d'elle voulait la tuer, ben ça ne serait que trop facile... Elle attendait une réponse, la lumière toujours aveuglante dans les yeux quand enfin le faisceau se baissa et une voix d'enfant se fit entendre... Makura.

"Ma... Makura ? Je... c'est Keiko... tu... je ne veux pas te faire de mal, je suis juste tombée..."

Keiko avait vite retrouvé la pêche en entendant que c'était Makura, parce qu'elle ne la craignait pas du tout, sans être méchante, elles ne s'étaient jamais parlés toutes les deux, et Keiko avait une fierté qui lui interdisait de parler aux gens sales et inintéressants. Elle ne la détestait pas non, mais Makura était tellement... maladroite, passive, faible, et pathétique que Keiko avait porté un jugement hâtif sur elle. Elle n'avait pas peur d'elle, aucunement, peu importe l'arme qu'elle avait, elle était trop maladroite pour s'en servir. Mais il ne serait tout de même pas très fut fut de lui parler agressivement comme d'habitude dans un contexte pareil... autant rester naturel et ne pas la regarder, comme si c'était une autre fille à côté d'elle, Misako pourquoi pas...

"Excuse-moi si jt'ai écrabouillé mais tu dois avoir l'ha... mal... non ?"

Keiko se rendit compte que changer de personnalité juste pour ce jeu serait assez difficile, elle allait devoir être soi-même, alors elle s'assit en face d'elle et en posant ses mains sur ses genoux, elle lança :

"Bon Makura, c'est pas un secret, toi et moi on a jamais été de grandes amies n'est-ce pas ? Je t'avoue même que je te connais à peine... je ne me rappelle que ton odeur quand tu te faufilais à ta place en cours et ça me donne la nausée ok ? mais dans ce jeu on est tous dans le même bateau, c'est pas la solution de rester planter là à attendre qu'une autre personne t'écrase et te fasse la peau !" cracha-t-elle pleine de venin et de pitié aussi de voir Makura dans cet état, recroquivillée sur elle-même à même pas un mètre du batiment principal... "parce que moi je vais pas te tuer, je suis pas une criminelle, mais je veux pas non plus te sauver tu comprends, je suis pas là pour faire la charité, faut se battre Makura... Alors je vais me lever et m'en aller, pour aller botter le cul de ceux et celles qui le méritent et si tu veux venir avec moi, ben t'as juste à tendre ta main vers moi... je la prendrais pas, tu es sale... mais j'aurais compris..."

Keiko n'était pas douce, elle ne l'avait jamais été, mais au moins les choses étaient dîtes et c'était à Makura de se prendre en mains, soit de dire merde à Keiko en affirmant un peu sa personnalité, soit de la suivre dans leurs futures emmerdes, alors qu'elles ne s'entendent pas très bien... le choix était folklo !

[E07]

Le sourire sur le visage de Makura était simple, pas forcé, pas joyeux, pas malheureux, plus rien du tout en fait. La jeune fille était à ce moment-là totalement vide de tout sentiment, la haine, la vengeance, la peur, à quoi bon ? Elle ne serait bientôt plus là, et l'avait accepté, plus de regrets, plus de remords, plus rien.
« Non non... J'ai rien. C'est gentil de t'excuser. » répondit-elle aux excuses de sa camarade, d'une voix douce. « Et, toi... tu, tu n'as rien ? Je suis désolée ! » rajouta la nippone, rougissant légèrement.
Pourquoi s'excusait-elle ? Elle-même ne le savait vraiment pas, mais elle avait pris cette habitude, de s'excuser de tout, pour tout, pour ne pas vexer les gens, pour montrer qu'elle était gentille et serviable, seulement, ce caractère-là n'était pas tellement apprécié dans le monde où elle vivait.

C'est alors que Keiko fit son discours, durant tout le long, Makura la regarda, les yeux éxorbités, la bouche ouverte, incapable de dire quoi que ce soit, de réagir. *Je... sens mauvais ? Mes vêtements sont troués et déchirés, mais... je les lave et je me lave tous les jours je... Je pue ?* Si elle avait su cela, elle aurait fait quelque chose et peut être qu'elle aurait eu des amis. Vie ratée.
Enfin, Keiko lui proposait de se joindre à elle, pour se battre contre les méchants, pour se bouger, pour pas rester là à s'appitoyer comme elle l'avait fait depuis le début du jeu.
Un instant, Makura réfléchit, elle acceptait de mourir car sa vie était pourrie et qu'elle ne servait à rien, et qu'elle préférait que d'autres qui le méritaient vraiment, vivent. Cependant, il y aurait des méchantes personnes, d'horribles personnes. Oui.. elle pourrait se joindre à Keiko pour combattre les méchants pour qu'un gentil puisse être sauvé, oui !
Une étincelle passa briévèment dans le regard de Makura.

« Je te suis, Keiko. Je... je refuse qu'une personne méchante gagne ce jeu... » elle insista fortement sur la dernière partie de sa phrase, la disant d'une voix sûre, plus forte, plus déterminée. Ce jeu allait changer Makura, jusqu'à sa mort proche...

[E07]