Un jour comme les autres ...

...

"Hey, je vous signale que je fais pas mon cours pour les murs !"

... Bien une réplique de prof, ça.
Yuyô referme son livre. Pour une fois qu'il fait l'effort de venir en cours, on trouve le moyen de lui faire une remarque. Tant pis, il évitera de recommencer son erreur trop de fois.

"Pour le peu de fois où je vous remarque dans ce cours, vous pourriez au moins avoir la décence de suivre un peu !"

Ah tiens, lui aussi ça lui fait bizarre ? Au moins, il se sent moins seul !
... Bon, c'est pas tout, mais il faudrait songer à rentrer, il a perdu assez de temps ici.
Il range son livre dans son sac, puis réfléchit quelques secondes, alors qu'il commence à se lever.
Le prof a repris son cours, mais pas pour bien longtemps ... Une voix vient l'interrompre de nouveau.

"Au risque de paraître désobligeant ... Le résultat que vous avez inscrit au tableau contient une erreur. Aux dernières nouvelles, une racine de 25 n'a jamais donné 9 ... De n'importe quelle façon dont on la considère. Du moins, selon votre enseignement."

Terminé. Il a bien préparé sa réplique, et une fois de plus, il n'a eu aucun mal à contrer une énième remarque concernant son attitude en cours. Il se lève, puis commence à se diriger vers la sortie, laissant le prof en plan, l'air hébété, complètement déstabilisé par cette remarque. Non pas qu'une erreur le mette dans cet état, mais surtout le fait qu'il croyait que Yuyô n'avait pas suivi une seule seconde le cours. Ca n'était pas faux, mais étant donné ses facilités à la réflexion et à la logique, il ne lui avait suffit que de quelques secondes pour déceler l'erreur. Coup de bol aussi, parce que s'il n'y en avait pas eu, il aurait eu plus de mal à trouver une excuse pour s'enfuir.

"... Je suis désolé, mais je crois avoir perdu assez de temps, là, vous trouvez pas ?? ... Bon, bonne journée !"

Pas le temps de le laisser parler. De toute façon, il sait bien qu'on ne le rattrapera pas, d'une part parce que le prof est trop décontenancé par ce qu'il vient de prendre et d'autre part parce que plus personne ne cherche à le sanctionner, puisqu'on sait qu'il a des capacités énormes, même si c'est "dommage de laisser se dégrader un tel potentiel", comme ils disent ...
"Dégrader" ... Si ils savaient ... Ce serait plutôt le contraire. Yuyô passe le plus clair de son temps à lire, tout et n'importe quoi. De plus, il s'intéresse de près aux métiers de ses parents, à tel point qu'il a réussi à obtenir la moitié du niveau requis pour les exercer.

Oui ... Mais qu'est-ce que ça change ? C'est juste histoire de passer le temps, parce qu'il ne veut pas sortir, rencontrer d'autres gens, s'amuser ... Il s'en fout royalement, à vrai dire. Bien sûr, c'est étrange, mais il apprécie certaines personnes, mais ça s'arrête là.
La tête entre autre emplie de pensées de ce genre, Yuyô marche nonchalamment sur le chemin du retour.

Ses parents le réprimanderaient sûrement d'avoir quitté le cours, mais gentiment, ils savaient ce que valait leur fils, et restaient assez légers sur ce genre de faits ... Même si ça n'était pas forcément la bonne solution, Yuyô les remerciait, du fond du coeur, silencieusement, de cette compréhension. Il les aimait vraiment, même si c'était difficile de le montrer, et ils restaient les dernières personnes qu'il voulait décevoir malgré tout ...

En revanche, il avait entendu parler d'un voyage qui devait avoir lieu le surlendemain. Il ne savait pas vraiment s'il devait y aller ou non, c'était pas vraiment son truc ...
Pour se changer les idées, pourquoi pas. Mais après tout, il s'en foutait un peu, de se changer les idées ... Il n'y tenait pas tant que ça.
Bah ... Il ferait l'effort d'aller en cours le lendemain, au moins pour voir de quoi il en résulte, ça lui ferait déjà une idée de ce qui l'attendrait.
Pour le moment, il songeait plus à ce qu'il allait faire une fois rentré chez lui.

[ Premier Post ]

Frotter. Frotter. Encore et toujours frotter.
Makura avait décidé de ne pas aller en cours pour le dernier jour d'école. Les professeurs avaient dit qu'ils avaient tous fini leurs programmes, aucune utilité à aller au lycée ces derniers jours. Ce serait certainement une ambiance "amicale", qui sait, peut-être même feraient-ils un goûter comme dans sa classe, l'année dernière. A croire que la jeune fille était masochiste, à quoi bon se remémorer ces souvenirs si déplaisant. Enfin bref. Elle avait donc un jour où elle pouvait faire ce qu'elle voulait. En premier lieu, elle força sa mère à prendre une matinée de repos, où elle pourrait dormir et se reposer tranquillement, c'était si rare. Grand effort pour Makura de devoir se lever tôt, très tôt. Elle se força, avec bien des difficultés, pour sa mère et son bien-être.
Et voilà, maintenant, elle frottait, encore et encore. Le sol. Les WC. La vaisselle. Les carreaux. Le mobilier. Ca faisait 4 heures que la jeune fille faisait ça, et elle en était exténuée, réellement. Comment sa mère faisait ? Pour supporter plus de 10 heures de travail comme ça ? Tous les jours ? L'admiration qu'avait la jeune fille pour sa mère n'était vraiment pas fondée sur des broutilles...
Vers midi, sa mère arriva, lui lança un sourire et lui arracha des mains l'éponge sale qu'elle avait dans les mains.
« Profite de ta jeunesse ma fille, ne t'inquiètes pas pour moi. » fut la seule chose qu'elle lui dit. Makura aurait pu riposter, lui demander de retourner se reposer, mais elle connaissaittrop bien sa mère pour savoir que c'était inutile, elle aurait refusé... Comme quoi, l'honnêteté et la gentillesse ne sont pas des critères principaux pour réussir dans la vie, au contraire.

L'adolescente sortit calmement de sa "maison". Ses vêtements sales et tachés, mais bon, quelle importance ? Du moment qu'elle en avait, c'était le principal. Elle n'était pas comme la plupart ( pour ne pas dire tous ) les gens de sa classe, accros à leur allure, avec une garde robe immense, faisant leurs courses tous les jours. Quelle inutilité. Gaspiller son argent comme ça... De toute manière, pas de problème de gaspillage chez Makura, elle n'avait pas d'argent. La vie est mal faite hein. C'est toujours les gens aux difficultés financières qui sont les plus économes et les plus intelligents face à l'importance de l'argent, et c'est toujours les gens riches qui ne se rendent pas compte de leur stupidité à gaspiller des dizaines, voire des centaines de milliers de Yens pour des choses sans réelle importance.

Ando lui avait donné rendez-vous dans 2heures au magasin, il avait quelque chose d'important à lui dire, enfin c'est ce qu'il lui avait dit... Makura était un peu intriguée, mais bon. Enfin, là, elle avait le temps de se promener en ville, pourquoi pas de se poser sur un banc et de dessiner. Oui. Ou alors lire. Ando avait été d'une gentillesse extrème et lui avait offert cinq livres. La jeune fille aimait beaucoup lire, seulement elle n'avait pas assez d'argents pour s'acheter des livres, et même la carte d'abonnement de la bibliothèque du coin était trop chère pour la jeune fille.

Makura était totalement plongée dans ses réflexions, que lorsqu'elle tourna au coin du trottoir, elle ne remarqua pas le garçon qui venait face à elle. Elle se le prit en plein fouets. Ne s'y attendant pas, sous le choc, elle tomba assez violement.
*Mince !! Marre d'être aussi maladdroite* pensa-t-elle directement. Elle n'avait pas remarqué si la personne qu'elle s'était prise était aussi tombée et n'osa pas la regarder, trop honteuse de sa bêtise.

« Désolée !! Vrai- vraiment je suis dé- désolée, je ne voulais pas... Je n'ai pas... fait exprès. » bredouilla-t-elle, cachant son visage derrière ses cheveux. Elle posa sa main sur le sol afin de se relever mais un picotement insupportable s'éveilla de suite : elle s'était égratinée légèrement la main sur le coup.

(bon bah, je nous ai fait rencontré du mieux que j'ai pu hein ^^ question idiote : tu mesures combien ? Parce que Makura fait 1m75 donc elle est assez grande, peut être plus que toi, 'fin ça dépend ^^ voili voilou, si ya des problèmes fais moi signe et j'édite !)

[Baaah à vrai dire, ça devrait aller, parce que Yuyô aussi est assez grand, il doit faire dans les 1.80, donc bon, c'est équitable ^-^]

Tête baissée, Yuyô songeait distraitement à ce qui allait se passer durant ce voyage. D'ordinaire, ça lui était complètement égal, étant donné les affinités qui le liaient aux autres ... Il était mieux loin d'eux qu'en leur compagnie, et ce, pendant plusieurs jours, en plus.
Il songea alors brusquement à Ayu ... Est-ce que tout serait différent si elle était encore là aujourd'hui ? Sûrement ... Yuyô ressentit une sorte de vive brûlure au plus profond de ses entrailles. La douleur de ce jour était encore bien trop présente en lui. Pourtant, pas mal d'années s'étaient écoulées, il avait vu bien d'autres choses, mais rien, jamais, ne lui ferait oublier la tristesse qui le rongeait de temps à autre.

Alors qu'il était en train de remuer un peu trop profondément le couteau dans la plaie qu'il venait de réouvrir, son visage passa de l'indifférence totale habituelle à une expression de profond désespoir. Ses yeux devinrent plus sombre, et il en oubliait complètement ce qui l'entourait. Il fixait le sol avec insistance, le regard perdu, le pas lourd, se replongeant dans des souvenirs encore trop douloureux pour le moment.
C'est ainsi qu'il sentit un projectile non-identifié s'écraser contre lui, le faisant reculer brutalement. Le projectile retomba ensuite par terre, laissant Yuyô perplexe et complètement désorienté ... Ayant perdu sur le coup tout le chagrin qui l'envahissait quelques secondes auparavant, pour faire place à une sorte d'étonnement inquiété, il observa longuement, après identification, la personne qui l'avait majestueusement bousculé.

Il s'agissait simplement ... D'une jeune fille.
Tant bien que mal, Yuyô tenta de reprendre son habituel air indifférent, mais sans conviction réelle ; trop de choses à la fois.
Et puis de toute façon, il ne la connaissait même pas ... Quoique, à bien y regarder, ce visage lui rappelait quelque chose. Il chercha rapidement ... Hum, peut-être qu'il aurait dû aller en cours plus souvent, finalement ! Encore que, si c'était rien que pour se souvenir des noms des élèves qu'il croisait, il s'en foutait un peu. Soudainement, son nom lui revint : Makura. Osoi Makura. A bien y réfléchir, il ne l'avait pas vu souvent en cours non plus, pour le peu de fois qu'il y était allé.

Elle avait l'air complètement égaré, effrayé, et surtout, paraissait réellement désolée, puisqu'elle n'osait même pas relever la tête vers Yuyô, bégayant des excuses. Ce dernier, déstabilisé, ne savait pas quoi faire ... C'est alors que, un peu brusquement, il tendit la main vers elle, afin de l'aider à se relever, puisqu'apparemment, elle s'était fait légèrement mal à la main. Sur le coup, il trouva son geste un peu déplacé, ça n'était pas son genre. Mais après tout, il s'en foutait, il ne la connaissait pas, alors qu'est-ce que ça lui coûtait ?
Allez, un peu de politesse ne tuant pas, il se risqua même à lui poser une question ...

"... Tu ne t'es pas fait mal ? ... Je suis désolé aussi, en fait. Je faisais pas attention non plus."

Bon, évidemment, on pouvait faire mieux, mais il avait du mal avec toutes les formalités de ce genre, il sortait tellement peu qu'il oubliait petit à petit ce que pouvait être l'amabilité. En fait, pour le moment, il n'y a qu'une personne avec qui il avait moins de difficulté, c'était Ayaki ... Pourquoi ? Il n'en savait même rien. Tant pis, ça n'était vraiment pas le moment de chercher de toute façon. Yuyô attendait seulement que Makura veuille bien de son aide pour se relever.
Elle paraissait un peu fatiguée, ses vêtements étaient peu reluisants, mais en dehors de ça, elle avait un visage plutôt charmant, malgré le fait qu'il soit constamment caché derrière des mèches de cheveux ... En y repensant, Makura n'était vraiment pas le genre de fille populaire du lycée où ils se trouvaient. C'était même le contraire, le souffre-douleur attitré de tous ceux qu'elle rencontrait ; et c'était bien tout ce qu'il savait en ce qui la concernait. Quand à lui, il ne la détestait pas, mais ne l'adorait pas non plus, il s'en foutait, comme à son habitude, ce qui était logique, puisqu'il ne la connaissait même pas.

[Ouiiiin je suis déééésoléééé Makura-chaaaaaaan ;_______; Honte sur moi, oui je sais, je sais, tu as parfaitement raison ;____;]

A cet instant précis, Yuyô se dit qu'un crime qui se serait déroulé sous leurs yeux aurait été moins horrible que la simple chute de Makura.
Elle ne cessait de trembler, osait à peine lever les yeux vers lui, et la seule fois où elle trouva le courage de le regarder, alors qu'il lui tendait la main, son expression toute entière se figea d'un sentiment de crainte infinie, comme s'il allait la torturer sur le champ.
Il ne savait pas quelle attitude adopter ... Peut-être que ce geste l'avait offensée, après tout, il ne savait pas trop, puisqu'il ne la connaissait que de nom.

Makura rebaissa aussitôt la tête, et, toujours au sol, recula comme elle put, comme si Yuyô avait une maladie super rare qu'elle allait choper ...
Dépité, il remit alors sa main dans sa poche, et l'observa. Elle était rouge au plus haut point, ses cheveux étaient complètement en bataille, etl ui cachaient une bonne partie de son visage aux traits légèrement tirés par la fatigue. Du moins, c'est ce qu'il avait retenu du peu qu'il avait pu apercevoir quelques secondes auparavant.
Ses habits étaient un peu déchirés par endroit, pas forcément bien propres, mais pas de quoi s'affoler non plus, ça arrivait à tout le monde.
Mais à bien y réfléchir, ça lui arrivait souvent, à Makura. Enfin, c'est ce qu'il avait entendu de la part des autres élèves de sa classe ; Makura était le souffre-douleur en chef de tous ses "camarades".
Pour sa part, il ne l'avait jamais insultée, jamais frappée, jamais ... Rien, ni même parlé. C'est à peine s'il savait quelque chose de son existence. Comme pour tous les autres élèves qu'il côtoyait en fait.

Pour l'instant, tout ce qu'il savait, c'est qu'il était vraiment dans une situation embarassante. Makura, hésitante, se releva finalement, un peu difficilement, étant donné la blessure qui la piquait à la main. Puis, une fois debout, elle resta plantée sur place, les yeux rivés au sol, bégayant des paroles d'excuses pour le moins incompréhensibles.
Yuyô, rarement en perte de contrôle de ses sentiments, ressentit pourtant à cet instant précis un léger sentiment d'anxiété se profiler au fond de ses entrailles ... Qu'est-ce qu'il devait faire ? Si ça se trouve, elle s'était vraiment fait mal, et il devait peut-être l'aider ... Mais il savait pas faire, ça, lui ! Et puis quelque part, ça ne le regardait pas, c'était quand même pas sa faute si elle ne regardait pas où elle marchait ... Non, quand même, ne pas penser comme ça, c'était pas sa faute à elle non plus.
Yuyô se décida enfin à prendre la parole alors qu'elle soupirait en se tapant la main contre le front, complètement abattue.

"Ecoute, euh ... Osoi-san. Je t'en veux pas, c'est pas grave, hein, ok ? Tu peux arrêter de t'excuser. ... Si jamais tu as vraiment mal, je peux ... Enfin, tu peux venir jusque chez moi, on de quoi soigner."

A peine sa phrase finie, il s'en voulut de l'avoir commencée. D'accord, il fallait faire preuve de gentillesse, mais en même temps, c'était pas son problème ! ... Bon, c'était pas le moment de réfléchir, autant continuer jusqu'au bout. Non pas que Makura n'était pas gentille, sûrement loin de là, mais comme tout le reste, il s'en foutait complètement, il voulait seulement, comme tous les soirs, retourner le plus vite possible là où il se sentait le moins mal : chez lui. Comportement des plus égoïstes, certes, mais involontaire ...
Gêné, Yuyô détourna son regard de la jeune fille, attendant une réponse de sa part, rapidement si possible. Jamais il n'arriverait à se défaire de sa nature profonde d'ours, pourquoi chercher à lutter ...